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Univers thématique

La shoah, non-dits et résilience

Aubrymore

a dit:

il y a 3 ans

Pour les gens de ma génération, les électrochocs, c'est le supplice infligé à Jack Nicholson, délinquant indomptable dans le film « Vol au dessus d'un nid de coucou ». Actuellement, on a changé le nom pour faire plus civilisé. On appelle ça sismo thérapie, sismo, ou électronarcose. Et maintenant, on fait ça sous anesthésie générale, et par séries de plusieurs séances. Les indications en sont précises et limitées. Le résultat est souvent positif, il faut quand même un temps plus ou moins long pour récupérer sa mémoire immédiate. Le chapitre ci-dessous provient d'une partie inédite de mon roman « Qui a tué Frajdla Cinnamone » Le roman raconte l'histoire d'un peintre, qui arrivé à l'âge de 45 ans, découvre que sa grand-mère est morte à Auschwitz. Il est alors en pleine dépression, et en pleine désespérance de voir un jour reconnu son concept de peinture recto-verso. Ce roman largement autobiographique est un travail sur la résilience et le devoir de mémoire. Clic. Électrique. Une déflagration de lumière. Le néon du plafonnier déchire mes paupières d'une décharge lumineuse assassine. Électrique. Rayon froid, je me sens comme un rat de labo dans une cage. Qu’est-ce qu'est-ce que j'ai bien pu faire pour mériter ça ? La même question qui tourne encore et toujours dans ma tête. En boucle, Sans que je parvienne à trouver ne serait-ce qu’un début de réponse. À quel moment ai-je commencé à couler dans cet abîme sans fond ? À tomber ? Encore et toujours. Sans début ni fin. Une éternité. L’ETERNITE. Qu’est-ce que j'ai bien pu faire pour me retrouver dans cette clinique psychiatrique ? Un glacial matin d’octobre. Glacial comme cet éclairage électrique sous lequel j'ai l'impression de me trouver nu et misérable sous le regard de cette femme, ce garde-chiourme. Exposé sous le néon cru. Dans cette chambre d'une couleur pisseuse. Clic. Électrique. Six heures du matin : réveil en sursaut. Comme un condamné. La lumière qu’on allume. Le néon agressif et l'infirmière qui aboie un ordre : « Dépêchez-vous de vous lever, monsieur Donnadieu ! Sismo ! Et prenez vos précautions ! » Quelles précautions ? Quelle sismo ? L'esprit embrouillé par le cocktail de médicaments qu'on m'administre, je peine à revenir sur terre. Sur ce monde de douleur. Électrique. Un flash de lucidité. Et brutalement, la douleur et le stress. À nouveau là, Qui ouvrent un jour nouveau à traverser comme un désert brûlant. « Levez-vous monsieur Donnadieu. Vous êtes bien à jeun ? Depuis hier soir minuit ? Non, vous ne pouvez pas boire d’eau. Oui, je sais que votre traitement vous donne la bouche sèche. » Rassemblement au petit jour de la troupe pitoyable. Comme pour une exécution capitale. Nous sommes la lie de l’humanité. Les yeux bouffis de sommeil. Le cheveu hirsute. La mâchoire qui pend. Cette putain de bouche qu'on arrive jamais à fermer complètement. Un effet secondaire des neuroleptiques et tout ces foutus pilules qu'on nous fait ingurgiter. Et puis on a cet cet air abattu, reconnaissable entre tous. Cet air propre aux dépressifs. Ceux qu’on ose à peine nommer. Comme si c'était contagieux. Cette maladie qui nous a transformés en spectres. Troupeau transi et hagard. Notre geôlière qui compte. « Un, deux, trois, monsieur Donnadieu cessez de traîner les pieds, combien de fois faut-il vous le dire ? Cinq, le compte est bon, on y va. » Avez-vous remarqué qu’elle avait un trousseau de clefs à la main ? Une multitude de clefs embrochées sur un gros anneau métallique ? Personne ne remarque rien d’ailleurs. Ni la couleur du sol, ni ce que représentent les puzzles accrochés aux murs, réalisés par d'autres malades passés ici avant nous. Tous drogués, sédatés. Abrutis. Le carrelage qui monte du sol le long du mur. Couleur diarrhée. Jusqu’aux interrupteurs électriques. Clic, Électricité. La lumière des néons qui clignotent avant de s'allumer. Je marche les yeux rivés au sol. « Monsieur Donnadieu, levez les pieds ! Déjà deux fois que je vous le dis ! » Porte métallique. Elle introduit la clef dans la serrure. Elle tourne, deux tours. Dans le sens inverse des aiguilles d’une montre. Clac, clac. Elle a ouvert la porte. Lumière encore plus violente. Crue et bleutée. Des arcs électriques qui brûlent les rétines. Électricité. Nous avons débouché dans le couloir principal de la clinique. Beaucoup plus luxueux que celui où nous sommes parqués, cloîtrés. La vitrine de l’établissement où on planque ces patients pas comme les autres. Des portes de prison verrouillées. Comme si nous pouvions nous échapper. Comme si nous pouvions même y penser, abrutis par les drogues comme nous le sommes – antidépresseurs, anxiolytiques, neuroleptiques, tranquillisants, somnifères, thymorégulateurs, hypnotiques. Pilules, gélules, injections, perfusions, les comprimés plein la main. Plein la bouche. Ce qui se voit est toujours plus beau que ce qu’on cache. On a bien raison de nous cacher. La lie de la terre. L’univers psychiatrique, propre, aseptisé, plus de cris comme avant. Étouffés par la pression des drogues. Mais la douleur est la même, elle est plus supportable pour les autres. Les normaux. Les valides. Vous, D’ailleurs, nous marchons sans dire un mot. Troupe passive partie pour se jeter un shoot d'électricité. Passés je ne sais par où. Pour nous retrouver devant le vieil ascenseur d'un gris lépreux. Peinture écaillée. Un ascenseur ? Non. Un monte-charge Comme celui de l'usine de mon père, à Paris. Image assassine qui me suffoque,il est mort. Depuis, La porte s'ouvre. La garde-chiourme doit ouvrir à la main la grille intérieure. Nous sommes montés. Otis, charge maximum huit-cent-soixante kilos, ouf, on a de la marge, Même si on est tous en surpoids à cause des médicaments, En surpoids, que dis-je, nous sommes tous énormes. Un groupe de cachalots échoué dans un ascenseur. Fermeture de la porte extérieure. « Poussez-vous monsieur Donnadieu, non il ne vous a pas bousculé exprès, madame Madiran. En voiture Simone ! » La matonne se croit obligée de lancer une plaisanterie qui tombe à plat. Pas envie de rigoler. Pas envie de sa bonne humeur à deux balles. Porte intérieure, bouton, électricité, montée. Avec notre air bovin. La plupart respirant par la bouche. Le menton pendant. Pas de salive, les traitements qui assèchent la bouche. Nous montons pour recevoir l’eucharistie magique, prenez et mangez ceci est mon corps. Rédemption pour tout le monde. Électricité. Ceci est mon sang. Électricité. Mais putain, j’ai pas d’âme ! Électricité. Ah bon, j’en ai une quand même, remboursée par la sécu? Électricité. Peut-être que c’est elle qui me fais si mal. Les électrodes, près de la table. Deux bâtons de verre avec une boule au bout. Électricité. Allongez-vous. Ouvrez la bouche. Ceci est mon corps. L’infirmière dépose la sainte compresse. Prenez et mordez, ceci est mon corps. Serrez les dents, c’est pour éviter de se mordre la langue. Respirez. Je pique. Ceci est mon sang, l’électricité est mon berger. Le liquide glacial dans le cathéter. Respirez. Le fourmillement dans les mâchoires. Non. Je ne veux pas. Trop tard. Le néant. Inconscience. Arrêt respiratoire. Allez, je le choque. Électricité. Convulsions. Cinquante secondes, cinquante-cinq, une minute. Tout se passe bien. Les autres, ne regardez-pas, assis sur le banc des remplaçants, ils attendent chacun leur tour, juste à coté du lit dans lequel ils vont passer aussi. Rédemption pour tout le monde. Tu as un pouls ? Non, merde, il va claquer. Non, il respire, c’est reparti. Au suivant. Et puis après. Longtemps après. Le réveil blanc et lisse, bien après la sortie de l’anesthésie- prenez et buvez, ceci est mon électricité. Tout ce blanc, à la sortie de l'interminable tunnel noir. Tout ce silence, comme c'est beau ! Qui m’a amené jusqu’ici ? Vous vous rappelez ? Respirez-je pique ? Je vais reformater votre disque dur. Non. Il a tout effacé. Le réveil sans rêve. Mais pourquoi je n’ai pas eu ma sismo. mais si vous l’avez eue. Vous vous rappelez votre nom ? Ce réveil d’une infinie légèreté. J’ai tout oublié. Si, je sais encore comment je m’appelle. Je n’ai réellement émergé que vers dix heures du matin. Avec une perfusion dans la main droite. J’ai levé les yeux jusqu’à la poche de plastique. Tranxène. J’ai une impression de vide total dans la tête. L'impression d'avoir un champ de neige à la place du cerveau. Je me suis rappelé : la sismo. J’ai appelé l’infirmière. «  Pourquoi on ne m’a pas fait la sismo prévue ? - Rassurez-vous, on vous l’a faite. Vous ne vous rappelez de rien, c’est normal. » Je me suis alors rendu compte avec consternation qu’elle disait vrai : je viens de découvrir avec horreur que mon caleçon et mon pantalon de pyjama sont mouillés. Il me semblait avoir pris mes précautions. D’ailleurs, l’infirmière qui était venue me chercher me l’avait rappelé. Je n'avais pas compris. Au cours de la crise convulsive je me suis pissé dessus. J'ai appelé une infirmière, qui n'est arrivée qu'après plusieurs coups de sonnette. Et qui s'est foutu de moi, du genre alors on a fait un gros pipi dans sa culotte. Un petit coup d'humiliation, ça ne gâche rien. C'est tellement facile avec ces barjots. Et puis après tout, non, un gros coup d'humiliation, c'est encore mieux. Elle a refusé de me passer des vêtements secs, elle a tenu à me changer elle-même. Alors que j'étais attaché à mon lit par ma perfusion. J'ai alors découvert un des miracles des électrochocs : plus rien n'avait d'importance. Pour les gens de ma génération, les électrochocs, c'est le supplice infligé à Jack Nicholson, délinquant indomptable dans le film « Vol au dessus d'un nid de coucou ». Actuellement, on a changé le nom pour faire plus civilisé. On appelle ça sismo thérapie, sismo, ou électronarcose. Et maintenant, on fait ça sous anesthésie générale, et par séries de plusieurs séances. Les indications en sont précises et limitées. Le résultat est souvent positif, il faut quand même un temps plus ou moins long pour récupérer sa mémoire immédiate. Le chapitre ci-dessous provient d'une partie inédite de mon roman « Qui a tué Frajdla Cinnamone » Le roman raconte l'histoire d'un peintre, qui arrivé à l'âge de 45 ans, découvre que sa grand-mère est morte à Auschwitz. Il est alors en pleine dépression, et en pleine désespérance de voir un jour reconnu son concept de peinture recto-verso. Ce roman largement autobiographique est un travail sur la résilience et le devoir de mémoire. Clic. Électrique. Une déflagration de lumière. Le néon du plafonnier déchire mes paupières d'une décharge lumineuse assassine. Électrique. Rayon froid, je me sens comme un rat de labo dans une cage. Qu’est-ce qu'est-ce que j'ai bien pu faire pour mériter ça ? La même question qui tourne encore et toujours dans ma tête. En boucle, Sans que je parvienne à trouver ne serait-ce qu’un début de réponse. À quel moment ai-je commencé à couler dans cet abîme sans fond ? À tomber ? Encore et toujours. Sans début ni fin. Une éternité. L’ETERNITE. Qu’est-ce que j'ai bien pu faire pour me retrouver dans cette clinique psychiatrique ? Un glacial matin d’octobre. Glacial comme cet éclairage électrique sous lequel j'ai l'impression de me trouver nu et misérable sous le regard de cette femme, ce garde-chiourme. Exposé sous le néon cru. Dans cette chambre d'une couleur pisseuse. Clic. Électrique. Six heures du matin : réveil en sursaut. Comme un condamné. La lumière qu’on allume. Le néon agressif et l'infirmière qui aboie un ordre : « Dépêchez-vous de vous lever, monsieur Donnadieu ! Sismo ! Et prenez vos précautions ! » Quelles précautions ? Quelle sismo ? L'esprit embrouillé par le cocktail de médicaments qu'on m'administre, je peine à revenir sur terre. Sur ce monde de douleur. Électrique. Un flash de lucidité. Et brutalement, la douleur et le stress. À nouveau là, Qui ouvrent un jour nouveau à traverser comme un désert brûlant. « Levez-vous monsieur Donnadieu. Vous êtes bien à jeun ? Depuis hier soir minuit ? Non, vous ne pouvez pas boire d’eau. Oui, je sais que votre traitement vous donne la bouche sèche. » Rassemblement au petit jour de la troupe pitoyable. Comme pour une exécution capitale. Nous sommes la lie de l’humanité. Les yeux bouffis de sommeil. Le cheveu hirsute. La mâchoire qui pend. Cette putain de bouche qu'on arrive jamais à fermer complètement. Un effet secondaire des neuroleptiques et tout ces foutus pilules qu'on nous fait ingurgiter. Et puis on a cet cet air abattu, reconnaissable entre tous. Cet air propre aux dépressifs. Ceux qu’on ose à peine nommer. Comme si c'était contagieux. Cette maladie qui nous a transformés en spectres. Troupeau transi et hagard. Notre geôlière qui compte. « Un, deux, trois, monsieur Donnadieu cessez de traîner les pieds, combien de fois faut-il vous le dire ? Cinq, le compte est bon, on y va. » Avez-vous remarqué qu’elle avait un trousseau de clefs à la main ? Une multitude de clefs embrochées sur un gros anneau métallique ? Personne ne remarque rien d’ailleurs. Ni la couleur du sol, ni ce que représentent les puzzles accrochés aux murs, réalisés par d'autres malades passés ici avant nous. Tous drogués, sédatés. Abrutis. Le carrelage qui monte du sol le long du mur. Couleur diarrhée. Jusqu’aux interrupteurs électriques. Clic, Électricité. La lumière des néons qui clignotent avant de s'allumer. Je marche les yeux rivés au sol. « Monsieur Donnadieu, levez les pieds ! Déjà deux fois que je vous le dis ! » Porte métallique. Elle introduit la clef dans la serrure. Elle tourne, deux tours. Dans le sens inverse des aiguilles d’une montre. Clac, clac. Elle a ouvert la porte. Lumière encore plus violente. Crue et bleutée. Des arcs électriques qui brûlent les rétines. Électricité. Nous avons débouché dans le couloir principal de la clinique. Beaucoup plus luxueux que celui où nous sommes parqués, cloîtrés. La vitrine de l’établissement où on planque ces patients pas comme les autres. Des portes de prison verrouillées. Comme si nous pouvions nous échapper. Comme si nous pouvions même y penser, abrutis par les drogues comme nous le sommes – antidépresseurs, anxiolytiques, neuroleptiques, tranquillisants, somnifères, thymorégulateurs, hypnotiques. Pilules, gélules, injections, perfusions, les comprimés plein la main. Plein la bouche. Ce qui se voit est toujours plus beau que ce qu’on cache. On a bien raison de nous cacher. La lie de la terre. L’univers psychiatrique, propre, aseptisé, plus de cris comme avant. Étouffés par la pression des drogues. Mais la douleur est la même, elle est plus supportable pour les autres. Les normaux. Les valides. Vous, D’ailleurs, nous marchons sans dire un mot. Troupe passive partie pour se jeter un shoot d'électricité. Passés je ne sais par où. Pour nous retrouver devant le vieil ascenseur d'un gris lépreux. Peinture écaillée. Un ascenseur ? Non. Un monte-charge Comme celui de l'usine de mon père, à Paris. Image assassine qui me suffoque,il est mort. Depuis, La porte s'ouvre. La garde-chiourme doit ouvrir à la main la grille intérieure. Nous sommes montés. Otis, charge maximum huit-cent-soixante kilos, ouf, on a de la marge, Même si on est tous en surpoids à cause des médicaments, En surpoids, que dis-je, nous sommes tous énormes. Un groupe de cachalots échoué dans un ascenseur. Fermeture de la porte extérieure. « Poussez-vous monsieur Donnadieu, non il ne vous a pas bousculé exprès, madame Madiran. En voiture Simone ! » La matonne se croit obligée de lancer une plaisanterie qui tombe à plat. Pas envie de rigoler. Pas envie de sa bonne humeur à deux balles. Porte intérieure, bouton, électricité, montée. Avec notre air bovin. La plupart respirant par la bouche. Le menton pendant. Pas de salive, les traitements qui assèchent la bouche. Nous montons pour recevoir l’eucharistie magique, prenez et mangez ceci est mon corps. Rédemption pour tout le monde. Électricité. Ceci est mon sang. Électricité. Mais putain, j’ai pas d’âme ! Électricité. Ah bon, j’en ai une quand même, remboursée par la sécu? Électricité. Peut-être que c’est elle qui me fais si mal. Les électrodes, près de la table. Deux bâtons de verre avec une boule au bout. Électricité. Allongez-vous. Ouvrez la bouche. Ceci est mon corps. L’infirmière dépose la sainte compresse. Prenez et mordez, ceci est mon corps. Serrez les dents, c’est pour éviter de se mordre la langue. Respirez. Je pique. Ceci est mon sang, l’électricité est mon berger. Le liquide glacial dans le cathéter. Respirez. Le fourmillement dans les mâchoires. Non. Je ne veux pas. Trop tard. Le néant. Inconscience. Arrêt respiratoire. Allez, je le choque. Électricité. Convulsions. Cinquante secondes, cinquante-cinq, une minute. Tout se passe bien. Les autres, ne regardez-pas, assis sur le banc des remplaçants, ils attendent chacun leur tour, juste à coté du lit dans lequel ils vont passer aussi. Rédemption pour tout le monde. Tu as un pouls ? Non, merde, il va claquer. Non, il respire, c’est reparti. Au suivant. Et puis après. Longtemps après. Le réveil blanc et lisse, bien après la sortie de l’anesthésie- prenez et buvez, ceci est mon électricité. Tout ce blanc, à la sortie de l'interminable tunnel noir. Tout ce silence, comme c'est beau ! Qui m’a amené jusqu’ici ? Vous vous rappelez ? Respirez-je pique ? Je vais reformater votre disque dur. Non. Il a tout effacé. Le réveil sans rêve. Mais pourquoi je n’ai pas eu ma sismo. mais si vous l’avez eue. Vous vous rappelez votre nom ? Ce réveil d’une infinie légèreté. J’ai tout oublié. Si, je sais encore comment je m’appelle. Je n’ai réellement émergé que vers dix heures du matin. Avec une perfusion dans la main droite. J’ai levé les yeux jusqu’à la poche de plastique. Tranxène. J’ai une impression de vide total dans la tête. L'impression d'avoir un champ de neige à la place du cerveau. Je me suis rappelé : la sismo. J’ai appelé l’infirmière. «  Pourquoi on ne m’a pas fait la sismo prévue ? - Rassurez-vous, on vous l’a faite. Vous ne vous rappelez de rien, c’est normal. » Je me suis alors rendu compte avec consternation qu’elle disait vrai : je viens de découvrir avec horreur que mon caleçon et mon pantalon de pyjama sont mouillés. Il me semblait avoir pris mes précautions. D’ailleurs, l’infirmière qui était venue me chercher me l’avait rappelé. Je n'avais pas compris. Au cours de la crise convulsive je me suis pissé dessus. J'ai appelé une infirmière, qui n'est arrivée qu'après plusieurs coups de sonnette. Et qui s'est foutu de moi, du genre alors on a fait un gros pipi dans sa culotte. Un petit coup d'humiliation, ça ne gâche rien. C'est tellement facile avec ces barjots. Et puis après tout, non, un gros coup d'humiliation, c'est encore mieux. Elle a refusé de me passer des vêtements secs, elle a tenu à me changer elle-même. Alors que j'étais attaché à mon lit par ma perfusion. J'ai alors découvert un des miracles des électrochocs : plus rien n'avait d'importance.

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Aubrymore

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il y a 3 ans

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